Jedi Blue dans le viseur de Bruxelles

L’affaire a été dévoilée par des journalistes du Wall Street Journal fin 2020 : Google et Meta (ex Facebook) auraient passé un pacte secret pour se tailler la part du lion sur un secteur particulier du marché publicitaire. Nom de code de l’accord : Jedi Blue.

Ce secteur, c’est celui lié au « header bidding ».

Qu’est-ce que le header bidding ?

Le « header bidding » fonctionne à partir d’un script téléchargé depuis le « header » de la page web de l’annonceur (d’où son nom). Il permet à l’éditeur du site d’offrir aux enchères ses espaces publicitaires à un plus grand nombre d’ad exchangesSSP ou trading desks. Et donc en théorie d’optimiser la monétisation de son trafic.

Le « header bidding » permet de mettre en concurrence plusieurs réseaux d’Ad-Exchange en RTB (Real Time Bidding). On oppose souvent cette approche au « Waterfall Bidding ».
Source de l’image : AdMixer

Jedi Blue a déjà donné lieu à une plainte antitrust aux USA

L’existence d’un accord secret entre Google et Meta pour évincer les concurrents dans le contexte d’un « header bidding » a été rendu public dans le cadre d’une plainte antitrust aux USA déposée en décembre 2020 .

Une version non censurée des réquisition a fuité en octobre dernier, ce qui a permis de connaître un peu mieux la teneur de l’accord.

Pour évincer ses concurrents, Google aurait convaincu Facebook d’arrêter de s’impliquer sur le « header bidding » en échange de mesures favorisant Facebook sur les plateformes publicitaires de Google. Notamment, Google est accusé d’avoir fourni au réseau publicitaire de Facebook (Facebook Audience Network) des données lui permettant de remporter plus facilement les enchères sur Open Bidding.

Meta et Google nient le caractère anticoncurrentiel de l’accord.

« Ce n’est pas parce que le procureur général Paxton [qui mène l’enquête pour la cour du Texas] affirme quelque chose que c’est vrai. En réalité, nos technologies publicitaires aident les sites web et les apps à financer leur contenu et permettent aux petites entreprises de toucher des clients dans le monde entier. Il existe une concurrence vigoureuse dans le domaine de la publicité en ligne, qui a permis de réduire les frais d’ad tech et d’élargir les options pour les éditeurs et les annonceurs. Nous nous défendrons fermement contre ses allégations sans fondement devant les tribunaux. »

Un porte parole de Google

Au tour de Bruxelles à présent

Vendredi 11 mars 2022, un communiqué publié par la Commission européenne annonce l’ouverture d’une enquête formelle en matière de pratiques concurrentielles afin de déterminer si un accord entre Google et Meta (anciennement Facebook) concernant les services d’affichage publicitaire en ligne a pu enfreindre les règles de concurrence de l’Union.

Margrethe Vestager, vice-présidente exécutive chargée de la politique de concurrence, a déclaré à ce propos:

«De nombreux éditeurs s’appuient sur l’affichage publicitaire en ligne pour financer des contenus en ligne pour les consommateurs. Par l’accord dit “Jedi Blue” entre Google et Meta, une technologie concurrente de l’Open Bidding de Google a pu être ciblée dans le but de l’affaiblir et de l’exclure du marché de l’affichage d’annonces publicitaires sur des sites web et des applications d’éditeurs. Si notre enquête le confirme, cela restreindrait et fausserait la concurrence sur le marché déjà concentré des technologies publicitaires, au détriment de technologies de diffusion d’annonces publicitaires concurrentes, des éditeurs et, en fin de compte, des consommateurs.»

Google n’a pas encore réagi à l’annonce de cette nouvelle enquête…

1 réflexion au sujet de « Jedi Blue dans le viseur de Bruxelles »

  1. Très bel article, mais il peut s’écouler de nombreuses années avant que la Commission Européenne ne statue, mette en application la règle éditée, sans compter l’armée d’avocats que ces deux géants pourraient engager pour faire trainer les choses.

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